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Covid-19
Comment les déboires de l’Italie et l’Espagne se répercutent en France

L’Italie et l’Espagne sont très durement touchées par l’épidémie de Covid-19. Une situation qui affecte, fatalement, les filières agricoles et agroalimentaires françaises.

« Les salaisonniers français, qui importent habituellement d’Espagne 30 % de leurs besoins, se reportent sur l’origine France », explique Paul Rouche, directeur délégué de Culture viande.
© Dominique Poilvet - Réussir

En retrait à l’export, l’Italie et l’Espagne ont offert des opportunités aux pommes et porcs français. À l’inverse, les exportations françaises de lait vrac sont freinées vers ces destinations, et ceux de brou-tards vers l’Italie menacent de l’être à court terme.

Pommes : hausse d’activité à l’export

Depuis le début du confinement, la filière pommes a connu un bond d’activité à l’export de 20 à 30 %, assure le directeur de l’Association nationale pommes poires (ANPP), Josselin Saint-Ray-mond. Malgré un léger tassement en semaine 13 (à 3 460 t exportés), les volumes exportés restaient supérieurs de 1 000 tonnes à 2019. Selon l’ANPP, cette croissance à l’export constatée en mars est directement liée à la crise du Covid-19. « La situation italienne a, je pense, compliqué la possibilité pour eux de servir normalement leurs clients, car ils ont déjà fort à faire pour travailler sur le marché intérieur », explique Josselin Saint-Raymond, en rappelant que l’Italie fait partie des grands pays exportateurs en Europe avec la Pologne et la France. « Nous avons des clients qui se sont rabattus vers les fournisseurs français, soit parce qu’il n’y avait pas de capacité d’offre suffisante, soit parce que les conditions n’étaient pas bonnes en transport, logistique ou en délais de disponibilité ». Les difficultés italiennes, ainsi que l’effet « achat de précaution » observé dans toute l’Europe, semblent avoir permis à la France de développer ses exportations vers ses voisins. Selon les dernières données de l’ANPP, les exportations de pommes françaises vers la Grande-Bretagne, un de ses principaux débouchés, ont bondi de 35 % pour les seules semaines 12 et 13. « Les volumes ont été multipliés par deux en semaine 12 » en direction de l’Allemagne, un autre grand marché pour la pomme française. Les envois ont aussi gonflé vers l’Espagne, le Benelux et les pays scandinaves.

Porcs : bilan positif, à l’export comme à l’import

Premier fournisseur de la France en viande de porc (notamment en jambons), l’Espagne voit ses expéditions freinées par les effets du Covid-19. De l’autre côté des Pyrénées, les usines subissent « une forte réduction d’activité », avec des niveaux d’absentéisme pouvant atteindre « jusqu’à 30 % » et des difficultés logistiques, explique Paul Rouche, directeur délégué de Culture viande (industriels), dans un entretien à Agra Presse le 7 avril. Résultat : « Les salaisonniers français, qui importent habituellement d’Espagne 30 % de leurs besoins, se reportent sur l’origine France ». Une situation qui pourrait « durer encore quelques semaines », estime Culture viande.
L’Italie, de son côté, est importatrice nette vis-à-vis de la France. « Les abattoirs tournent moins, mais les usines de transformation continuent de fonctionner », remarque Paul Rouche. D’où une augmentation des exportations françaises vers l’Italie. « Quand vous allez sur l’Italie, c’est que vous ne pouvez aller nulle part ailleurs, relativise Thierry Meyer, responsable de la filière porc chez Bigard. C’est un marché de dégagement, et c’est encore accentué en ce moment. »
Que ce soit avec l’Italie ou l’Espagne, il est encore trop tôt pour quantifier précisément ces flux. « Globalement, les industries agroalimentaires françaises sont beaucoup moins touchées qu’en Italie et en Espagne », remarque Paul Rouche. Chez nos voisins du Sud, l’épidémie de Covid-19 a frappé plus fort et plus tôt, on y observe « plus de cas directs dans les entreprises et dans l’entourage des salariés ».

Broutards : le marché italien résiste

En Italie, « la situation évolue au jour le jour », prévient Benoît Albinet, directeur de Deltagro, un des principaux exportateurs français de broutards. Premier débouché, notre voisin transalpin absorbe 80 % des exportations de broutards français. « Il n’y a pas de problèmes de transport, les flux sont maintenus à un niveau à peu près équivalent à 2019, mais ce n’est pas l’euphorie », affirmait Benoît Albinet à Agra Presse le 6 avril. Un peu plus tôt, la semaine du 16 mars, « les expéditions de bovins vivants de la France vers l’Italie avaient augmenté de 20 % », affirme Bruno Dufayet, président de la FNB (éleveurs de bovins viande, Fnsea). « Les Italiens ont acheté beaucoup à la mi-mars, confirme le directeur de Deltagro, mais la situation est en train de se régulariser ». « La stabilité des prix en Italie est en train de vivre ses derniers moments, craint Benoît Albinet. Le marché de la viande est en train de s’engorger dans toute l’Europe. Pour l’instant, l’Italie fait figure d’exception, car la grande distribution et les bou-cheries traditionnelles tirent leur épingle du jeu ». Ce n’est pas le cas de l’Espagne, où l’effondrement des prix de la viande entraîne ceux des animaux vivants. « On n’envoie plus d’animaux en Espagne, car ils nous demandent des prix trop bas », explique l’exportateur, qui constate des baisses d’environ « 80 euros pour un broutard » et de « 30 à 40 euros pour un veau laitier ». Une crise qui risque, tôt ou tard, de s’étendre à l’Italie.

Lait : turbulences

sur les envois de lait spot Importateurs de lait car déficitaires, l’Italie et l’Espagne ont, depuis le début de l’épidémie de Covid-19, réduit fortement leur demande de lait spot français. Les laiteries y tournent au ralenti par manque de main-d’œuvre et privilégient l’approvisionnement national. « En Italie, depuis début mars, il y a pas mal d’usines laitières qui ont fermé », observe Gérard Calbrix, spécialiste de la filière laitière. Résultat : le lait spot qu’elles importaient se retrouve en surplus en Allemagne et en France alors que le pic de collecte annuelle pointe déjà le bout de son nez. En Espagne, les usines tournent aussi au ralenti. « Le lait part moins vers l’Espagne », explique Claude Floch, directrice du Criel Occitanie (interprofession laitière régionale). Le prix du lait spot y avoisinerait même ponctuel-lement les 180 euros les 1 000 litres, indique-t-elle. Selon les dernières données de la Commission européenne, il était de près de 300 €/1 000 litres en Italie début avril.
Dans ces deux pays, les flux de lait importés sont questionnés. FranceAgriMer note le 26 mars que « l’assesseur à l’agriculture de la région Lombardie s’inquiète des volumes jugés exces-sifs de lait importé et craint des effets négatifs pour la production locale, dans un contexte de baisse de la demande. Il demande à l’industrie, et surtout à la grande distribution italienne, de donner un « signe de solidarité dans la chaîne d’approvisionnement en favorisant le lait local ».
La situation est analogue en Espagne. « Les producteurs font pression pour que les transformateurs réduisent leurs importations venant de France », nous apprend Gérard You, économiste à l’Institut de l’élevage.

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