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Scènes de guerre aux abords de Sainte-Soline

  Comme on pouvait le craindre, la manifestation organisée le week-end dernier dans les Deux-Sèvres contre les réserves de substitution s’est soldée par un affrontement plus que musclé entre les forces de l’ordre qui défendaient le site de Saint-Soline et certains opposants. 

Si la manifestation «Pas une bassine de plus», organisée par Bassines Non Merci, la Confédération Paysanne et les Soulèvements de la Terre, ne débutait que samedi dernier, c’est dès le vendredi que les manifestants sont arrivés. Un campement a été installé le matin sur une parcelle prêtée par un agriculteur, à Vanzay, et qui se trouvait en dehors de la zone où la Préfecture avait interdit les rassemblements. Dans l’après-midi, un convoi d’une quarantaine de tracteurs  s’est formé à Lusignan pour rejoindre le campement. Un passage compliqué par la présence des forces de l’ordre (le convoi avait été interdit par la Préfecture de la Vienne), et qui a généré de très nombreux embouteillages dans le sud Vienne, et notamment la nationale 10.

Le lendemain matin, dès 8h, la circulation était à nouveau difficile sur cette route, puisque de nouveaux manifestants rejoignaient Vanzay, pour le départ de la manifestation vers la réserve de Sainte-Soline, prévu à 10h. Au final, autour de 10 000 personnes ont entamé une marche de près de 6km pour rejoindre le site. Dans le même temps, 3200 gendarmes étaient eux répartis sur les routes à proximité (où les véhicules étaient contrôlés, et les accès parfois interdits) et évidemment autour de la réserve de Sainte-Soline. Un dispositif impressionnant avait été déployé tout autour: après les deux clôtures successives, des véhicules de la gendarmerie formaient un cordon, complété par des gendarmes. Ces derniers disposaient également de quads, motos de cross, chars, camion lance eau, et plusieurs équipes de la garde républicaine patrouillaient à cheval. Plusieurs centaines de journalistes étaient présents, dont de nombreuses chaînes de télévision, souvent avec des services de sécurité, comme lors de la plupart des manifestations annoncées comme violentes.

Les premiers manifestants ont été aperçus à proximité de la réserve vers 12h30, où le convoi est arrivé en trois groupes distincts. Même si c’est dès cet horaire que les premières grenades lacrymogènes ont été tirées, souvent depuis des quads, certainement pour concentrer l’arrivée des manifestants et éviter des attaques simultanées, c’est plutôt vers 13h que les premiers vrais affrontements se sont déroulés. Alors que la plupart des manifestants porteurs de drapeaux de syndicats, tels que la Confédération Paysanne, ou la France Insoumise sont pour la plupart restés à distance ( à une centaine de mètres des forces de l’ordre), un groupe, certainement de blacks blocks, s’est avancé.

1 h de combat

Une formation serrée, avec des personnes équipées de masques à gaz, la tête recouverte, protégées derrière des boucliers et des parapluies, qui a pris pour cible les gendarmes et leurs véhicules, sur le côté nord-est de la réserve. Jets de cocktails molotov, de pierres, de feux d’artifice de sont succédés pendant de longues minutes, aboutissant notamment à l’embrasement de 4 véhicules de gendarmerie. Dans le même temps, les gendarmes ont répliqué avec des grenades lacrymogènes et de désencerclement. Pas moins de 4 000 ont été jetées dans la journée. Un véritable combat, digne de scènes de guerre, qui a duré une heure, et pendant laquelle les «vrais» manifestants sont restés en retrait. Certains ont même quitté le site. Un combat qui a d’ailleurs éclipsé le fond du sujet, puisque le stockage de l’eau n’a finalement pas été réellement évoqué sur place.

À noter que dans le même temps, un village  associatif était organisé à Melle, où des conférences et débats étaient proposés le vendredi et le dimanche.  Côté bilan, la gendarmerie évoque une trentaine de militaires blessés, dont un en urgence absolue. Du côté des manifestants, 2 blessés ont été évacués en urgence absolue également, et les organisateurs avancent le chiffre de 200 blessés. Dès le lendemain, les organisateurs ont accusé les forces de l’ordre d’avoir retardé une évacuation. Une information démentie depuis par un médecin du Samu, et qui, sur le site, n’avait pas été évoquée par les représentants de la ligue des droits de l’homme, présents en tant qu’observateurs, et croisés en fin de journée.

«Ras-le-bol!»
À 6 km de la réserve, sur la commune de Vanzay, les habitants d’un hameau d’une dizaine de maisons ont découvert vendredi matin qu’un campement avait été installé à quelques centaines de mètres de chez eux. «Ils étaient déjà ici à 7h30» explique un habitant, qui évoque une voiture d’un voisin saccagée. Lui-même agriculteur, il ajoute qu’il avait bien du mal à travailler depuis plusieurs jours. «Mes vaches étaient affolées, notamment par le passage répété des hélicoptères. Elles sont habituellement sur une parcelle à Saint-Soline, et je les ai ramenées pour leur prophylaxie. Je ne sais pas quand je vais pouvoir les remmener. J’en ai ras-le-bol!» explique l’éleveur, qui ne savait pas non plus quand il pourrait aller les nourrir ce samedi. «Je devais aller faire des clôtures aujourd’hui. Mais se déplacer avec une tronçonneuse... ça n’est pas possible!». Plus près de la réserve de substitution, Alexis Maixandeau et Marjorie Lassagne ont eux aussi passé la journée de samedi sans trop pouvoir bouger de leur domicile de Sainte-Soline. «On n’a pas peur, mais on est agacés!» En octobre, ils étaient déjà aux premières loges. «On est censés être hypertranquilles dans ce secteur» regrette la jeune femme. Le couple, qui connaît des agriculteurs impliqués dans les projets de réserves et d’autres plutôt opposés, avoue ne pas vouloir se prononcer sur le fond du dossier.
 
Certains déçus, d’autres choqués
Suite à la manifestation, Philippe Tabarin, président de la chambre d’agriculture de la Vienne « condamne les violences et dégradations » et s’associe « avec la Coordination rurale 86 afin de dénoncer les agissements inacceptables de certains représentants de syndicats agricoles ». La chambre régionale d’agriculture dénonce elle aussi des « violences inacceptables face à un projet légal et indispensable pour le monde agricole ». Une condamnation partagée par la FNSEA et les JA de la Vienne, qui se demandent de plus comment la Confédération Paysanne  peut-elle «être aussi irresponsable et irrespectueuse des autres agriculteurs en dégradant les cultures et le matériel?»  Nicolas Giraud, président de l’association des irrigants de la Vienne se dit lui « choqué de cette déferlance de violence envers l’agriculture et l’irrigation ». L’agriculteur du nord de la Vienne ajoute qu’un « sentiment de dépit et de crainte » gagne ses confrères, dont certains « ont parfois peur de changer les enrouleurs » Bertrand Lamarche, président de Rés’Eau Clain rappelle que  «les violences des opposants n’apportent rien. Elles sont inappropriées, au regard  de la taille des réserves.» Pierre-Jean Clerc, porte-parole de la Confédération Paysanne de la Vienne, se dit lui « déçu du retour dans les médias ». Il était sur place le samedi, avec d’autres membres du syndicat du département, et regrette que ce soient les actes des activistes qui aient été relayés, et pas le fond. « On a reculé dès qu’on a vu des blessés ». De son côté le collectif Bassines non merci se félicite de la mobilisation tout en dénonçant « les graves violences aux personnes, menées une fois de plus par la police et qui nous remémorent le drame de Sivens » et assurant continuer le combat « malgré les intimidations et la brutalité extrême dont a fait usage le gouvernement ».
Impossible dialogue?
Alors que le sujet du stockage de l’eau divise au sein même des agriculteurs, Benoît Biteau pense que le dialogue est toujours possible. «C’est à l’État de mettre les gens autour de la table». Agriculteur en Charente-Maritime et député européen, l’élu Europe Ecologie les Verts était présent ce week-end. Un avis pas tout à fait partagé par un éleveur du sud Vienne, interrogé sur le sujet la veille de la manifestation. «C’est emblématique d’un vrai problème de fond: des intellos qui prennent les agricuteurs pour des bouseux. Et ce ne sont pas de gaz lacrymos qui vont changer le problème».
 
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